TERRE - Pourquoi il bloque, combien il gagne, pourquoi il n'ira pas voir le ministre : à Dunkerque, où une cinquantaine de bateaux bloquent tout accès, Patrick Haezebrouck, vice-président du comité des pêches, représentant CGT des artisans et marins-pêcheurs, s'explique.
Pourquoi bloquez vous?
Nous, ce qu'on veut, c'est aller tranquille à la mer. Or, notre quota est plus qu'explosé. On n'a droit qu'à 133 tonnes pour 18 bateaux à Dunkerque, on a déjà pêché 300. Ils veulent appliquer ça à la lettre, alors qu'il nous faudrait 600 tonnes. Il y a 10-15 ans, on avait 675 tonnes de quota. Si on accepte ce qui a été décidé, on est mort.
Le risque, c'est qu'il n'y ait plus de poisson.
Vous inquiétez pas, du poisson, dans la mer, y'en a. Mais les bateaux usines d'Unilever et Nestlé pillent la mer en développant l'aquaculture, qui nécessite de pêcher pour faire de la farine de poisson pour nourrir les poissons d'élevage. Bientôt il n'y aura plus que des navires usines, et il n'y aura plus d'artisans. On assiste à des plans de casse partout. On tue les usines, on tue les professions.
Le ministre de l'Agriculture et de la Pêche, Michel Barnier, se dit prêt à vous rencontrer, pourquoi refuser?
Il peut venir, s'il veut. Mais on n'ira pas le voir pour qu'il nous
propose de l'argent contre des arrêts temporaires ou des casses de
bateaux, ça ne nous intéresse pas. Après 30 ans de prime à la casse,
70% de la flotille française a disparu.
Comment ça se passe pour vous, pêcheur dunkerquois?
J'ai un petit bâteau de dix mètres, je pêche 130 jours dans l'année. Je pars à 3h du matin, je reviens vers 9h, je pêche sur les bords de côtes, surtout de la sole. L'an dernier, j'ai pêché 5 à 6 tonnes. Certains de mes collègues jusqu'à 40, ça dépend du bâteau. On n'a pas de quota individuel, on n'en veut pas.
Combien gagnez vous?
L'an dernier, moi et mes salariés, on a gagné 21.000 euros net chacun.
Que réclamez vous?
Une autre organisation. Qu'on se base sur un chiffre d'affaires, sur un nombre de jours en mer, pas sur des quotas.
Propos recueillis par Haydée Sabéran