ÉDUCATION - «Si tu veux faire not' bonheur, Marie-Jeanneu ! Marie-Jeanneu ! Si tu veux faire not' bonheur, Marie-Jeanne, rends nous nos heures !». Ils chantent, déchaînés, déguisés, joyeux et bruyants devant le rectorat de Lille, ce matin. Leur cible, Marie-Jeanne Philippe, la rectrice de l'académie de Lille. Les lycéens de Pasteur protestent contre la suppression de cinq à six postes de profs l'année prochaine. Et le passage, selon les profs grévistes, «de 25 à 35 élèves», .
Ils forment une masse compacte, devant les grilles. De temps en temps un jeune se détache du groupe, prend son élan, et lance une palme de natation. «On rend les palmes», sourit Mireille Vitel, une enseignante gréviste. Et une, et deux, et trois palmes, le plus loin possible. Applaudissements. Le groupe se lance dans une espèce de ronde sioux, tambourins à la main. Les policiers en tenue observent de loin.
«On est profondément choqué par ce qui se passe», dit Clémence, en 1ère L, une perruque couleur arc-en-ciel sur la tête. «Trente-cinq par classe c'est ingérable. Vous imaginez en physique-chimie ? On soutient au maximum nos profs, et les élèves qui vont subir cette réforme».
Mireille Vitel détaille le nombre de postes supprimés : «Un en lettres modernes, un en histoire géo, un demi poste en allemand, un demi poste en éco gestion. Par ailleurs, un prof de physique-chimie prend sa retraite, et un prof de maths est décédé. Ils ne sont pas remplacés». Selon Coraline Soulier, prof de lettres classiques, l'accompagnement personnalisé de 2 heures par semaine n'est pas faisable. «On dit aux parents qu'il y a un accompagnement personnalisé, ils s'imaginent que c'est vraiment personnalisé. Dans la réalité c'est un accompagnement personnalisé de 2 heures par an et par élève. Ce qui est difficile à vivre, c'est ce décalage entre l'effet d'annonce, et la réalité»
La fédération de parents d'élèves FCPE appelle à une journée morte demain. Une délégation a demandé à être reçue mardi.
Une prof soupire : «On nous jette comme des kleenex, et puis débrouille. C'est révoltant. On fait des économies, alors qu'on n'a pas les meilleurs résultats au bac dans l'académie». Elle ajoute qu'elle aimerait bien les voir devant une classe de 35, ceux qui prennent les décisions de supprimer les postes. «Ça doit valoir le coup d’œil».
Haydée Sabéran
SILENCE – Combien de postes supprimés à Pasteur ? Combien d'élèves par classe à la rentrée? Questions simples. On les a posées au rectorat, à 14h30, une première fois. Réponse : «On vous rappellera». Personne ne rappelle. On a l'habitude. On rappelle, on insiste. Réponse : «Nous n'avons pas les informations pour ces questions précises. Nous n'avons pas de réponse à donner aujourd'hui. Il y a 500 établissements dans l'académie, et 200 lycées. On ne peut pas donner l'info du tac au tac». On se pince. C'est bien le rectorat qui prend les décisions de suppressions de postes? Il est 17h, soit sept heures après le rassemblement des enseignants et des élèves devant ses grilles, et le rectorat ignore toujours combien de postes il a supprimé au lycée Pasteur. Ni combien d'élèves en moyenne les professeurs auront en face d'eux à la rentrée. Silence.
H.S.