POLITIQUE - Elle ne nomme ni le Front national, ni Marine Le Pen, mais au fond, c'est à leurs électeurs qu'elle parle. «Ce n'est pas à la moëlle épinière qu'il faut s'adresser, comme le font certains dirigeants de la droite et de l'extrême-droite, c'est au coeur et à la raison», lance Martine Aubry hier, dans les salons d'honneur de la mairie de Lille, en offrant à Stéphane Hessel en visite à Lille la médaille d'or .
Elle parle de «crise morale», quand «le président de la République continue à servir une minorité et à couvrir les fautes morales de ses ministres», de «République ébranlée», quand «on casse l'école, on casse l'accès aux soins, l'hôpital public, on abandonne la politique du logement, on réduit les policiers et les magistrats et que l'insécurité gagne». Elle continue : 40% des salariés «pas augmentés depuis cinq ans», un jeune sur cinq, et 1,2 millions de retraités «sous le seuil de pauvreté».
«Angoissé». Elle s'indigne du projet de supprimer l'impôt sur la fortune, relève qu'on ne peut qu'être «angoissé», quand «ceux qui ont un travail ne finissent pas les fins de mois, que le loyer atteint 40 ou 50% de son salaire, qu'on renonce à se soigner faute de moyens, quand on a du mal à payer la cantine de ses enfants». Cantine scolaire dont elle a divisé le prix par deux dans sa ville, quand elle a été réélue, en 2008, ce qu'elle se plaît d'habitude à rappeler.
«Débat douteux». Elle cite les «21 milliards d'euros de bénéfice» des banques, qui «abandonnent» les petites entreprises «et les Français». Ajoute que les «Français» sont «inquiets et souvent en colère parce que leur vie est dure (…) Ils ont l'impression que la France sert toujours les mêmes, ceux qui ont déjà tout». L'argent ? Elle cite Stéphane Hessel : «Le pouvoir de l'argent, combattu par la Résistance, n'a jamais été aussi grand, insolent, égoïste, jusque dans les plus hautes sphères de l'Etat».
Elle revient sur le «débat douteux» sur l'identité nationale, que le chef de l'Etat «a cherché à nous imposer, avant de s'attaquer» aux Roms, «mais ça n'a pas pris». Les révolutions arabes, et les vagues d'immigrations annoncées ? «A tous les oiseaux de mauvais augure qui veulent nous faire croire ce qui n'arrivera pas, le meilleur moyen de lutter contre le terrorisme, l'intégrisme, et même l'immigration, c'est de les aider à se développer». Le médaillé a répondu à sa «vieille amie Martine», en appelant «à ne pas nous laisser diriger par les gens d'argent et de pouvoir».
Haydée Sabéran