SOCIETE- En trois jours, c'était plié, le collectif des associations lilloises constitué. Le catalyseur ? Des élus de la ville ont affirmé que Fives et Wazemmes ne feraient plus partie des zones urbaines sensibles (ZUS), liste sur laquelle les deux quartiers sont inscrits depuis 1996. L'objet des inquiétudes associatives ? Le plan Espoir Banlieue de Fadela Amara.
Le ministère du Logement et de la Ville confirme implicitement, pour Fives et Wazemmes : il déclare se concentrer sur les quartiers prioritaires, moins nombreux, pour son plan Espoir banlieues. Une restriction de liste alors ? On en convient, du côté ministériel : "c'est fort possible". Une révision de la liste des ZUS est prévue en 2009. Entretien avec Xavier Cadet, porte-parole du collectif et directeur de Filofil, association de promotion de la lecture.
Pourquoi une telle mobilisation des associations lilloises ?
Quelque soit la véracité de cette annonce sur Fives et Wazemmes, les associations avaient suffisamment d'inquiétudes avec le plan Espoir Banlieue annoncé le 20 juin par Fadela Amara, la secrétaire d'Etat chargée de la politique de la ville, pour se mobiliser. Sur une mobilisation courte, à la veille des vacances, nous avons réussi à réunir une soixantaine de responsables associatifs. Je pense que c'est l'expression d'un mouvement de fond.
Qu'est-ce qui vous choque dans le plan Espoir Banlieues de Fadela Amara ?
On nous dit que depuis vingt ans, nous avons brassé du vent, que ce que nous avons fait n'a servi à rien. Là, je fais des bonds. Pourquoi alors après les émeutes de 2005, le premier geste du gouvernement Villepin a été d'augmenter les budgets de la politique de la ville ? On nous dit que maintenant, il faut une nouvelle donne. L'Etat veut tout diriger, là, vous devez faire ceci, là, vous devez faire cela. Or, une association, c'est justement l'inverse, c'est un mouvement qui remonte vers l'Etat. C'est un regroupement d'habitants qui fait émerger des besoins et demande aux pouvoirs publics des financements. C'est d'autant plus étonnant qu'on sait par ailleurs que l'Etat est dans un mouvement de désengagement général. Mon sentiment, c'est que l'Etat veut imposer sa présence dans le milieu associatif, au détriment des collectivités territoriales.
Quels sont les exemples concrets de cette nouvelle philosophie ?
Notre interlocuteur devient le préfet, alors qu'auparavant les dossiers CUCS étaient instruits par les villes. Nous sommes également inquiets sur les méthodes d'évaluation. Regardez par exemple les nouveaux contrats temps libre de la CNAF : la seule question qui intéresse, c'est combien d'enfants vous allez accueillir. C'est le quantitatif, pas le qualitatif. On ne demande pas ce que vous faite pendant ces temps d'accueil, quelles sont les actions de partenariat que vous menez. Mais avec cette politique de la rentabilité, comment voulez-vous mesurer l'action d'une association comme la mienne, qui travaille sur le partage du plaisir de lire ? Ah vous avez dit que vous auriez quinze enfants dans cette action, mais ils ne sont que douze, on ne financera l'année prochaine que douze places. Cela veut dire moins d'argent, et que donc l'association se restreint. Il faut des années pour monter une relation partenariale avec les structures, une relation de confiance avec les habitants. Et en un claquement de doigt, on peut faire effondrer tout cela.
Que veut le collectif aujourd'hui ?
Nous ne voulons pas être dans une opposition systématique, mais nous voulons comprendre les règles du jeu, où l'Etat veut aller, et essayer d'alerter quand il le faut.
Propos recueillis par S.M.