JUSTICE - Le représentant de la Chancellerie a demandé jeudi au Conseil supérieur de la magistrature (CSM) de prononcer la fin des fonctions de Gérald Lesigne, procureur de la République de Boulogne-sur-Mer et son «déplacement d’office», considérant qu’il avait une responsabilité dans le fiasco d’Outreau.
«Je demande le retrait des fonctions pour M. Lesigne et son déplacement d’office», a déclaré devant l’organe disciplinaire des magistrats le directeur des Services judiciaires (DSJ) Léonard Bernard de la Gatinais estimant que le magistrat avait bel et bien «failli», tant durant l’instruction de cette affaire de pédophilie, qu’au moment du procès d’assises en première instance. Troisième degré en partant du bas, sur une échelle de neuf sanctions allant de la réprimande à la révocation, le «retrait des fonctions» concerne la fonction actuellement exercée par Gérard Lesigne, procureur de la République de Boulogne-sur-Mer.
Léonard Bernard de la Gatinais a également demandé au Conseil de dire que les faits reprochés à Gérald Lesigne étaient «contraires à l’honneur» et, de ce fait, ne pouvaient bénéficier d’une amnistie. L’«avis» du CSM - destiné à la garde des Sceaux Rachida Dati, à qui revient la décision finale - sera mis en délibéré à l’issue des plaidoiries de la défense. «Souvenons-nous longtemps d’Outreau pour que cela ne se reproduise pas», a lancé le représentant de la Chancellerie, rappelant que si Outreau avait d’abord été un drame pour les 13 acquittés, il «résonnera aussi très longtemps dans la mémoire collective de la République».
S’il a reconnu «le courage», «le dévouement et l’engagement» de Gérald
Lesigne, il n’en a pas moins estimé qu’il avait «gravement manqué à ses
devoirs de chef de parquet». Certes, 64 autres magistrats ont
«participé à ce désastre» et auraient pu également faire l’objet de
poursuites, a-t-il concédé, mais dans une telle procédure, le procureur
de la République a un rôle à part. «Il est évident qu’il n’est pas un
organe de contrôle de l’instruction», mais «c’est un acteur majeur»,
«une plaque tournante, une courroie de transmission», qui aurait pu
pousser «le cri d’alarme» qui aurait «arrêté ce train engagé dans les
voies que l’on connaît». Le DSJ a également critiqué le manque de
rigueur et de fiabilité des rapports administratifs adressés par le
procureur à sa hiérarchie. Des rapports contenant des informations «qui
dénaturaient la réalité des faits» et montraient son «incapacité à se
détacher d’une conviction ne reposant sur aucun élément objectif».
AFP