CULTURE - Son accordéon posé sur le cercueil, des centaines de gens tristes. Aux funérailles du comédien et accordéoniste Denis Cacheux, samedi, la salle était trop petite pour contenir les artistes, amis, élus, syndicalistes, spectateurs, venus lui dire au revoir au crématorium de Wattrelos, où il a été incinéré. William Schotte les a accompagnés au violoncelle. Anne Cuvelier a chanté un couplet du Temps des cerises.
On a connu Denis Cacheux comédien, et chanteur-accordéoniste, dans le duo qu'il formait avec Anne Cuvelier. Une casquette molle, un gilet, une boucle d'oreille de pirate, un éclair malicieux dans l'oeil. Syndicaliste CGT, pour la défense des intermittents du spectacle, dans le Nord et en Avignon.
Avec Libération, il avait participé à l'opération «1000 fanfares» pour la libération de Florence Aubenas et Hussein Hanoun enlevés à Bagdad, en 2005. Il s'était posé, tout seul, place Richebé à Lille, et plutôt que de jouer seulement, il avait harangué la foule, à l'improvisade, avec panache, toute une après-midi. Il avait dit oui tout de suite, pas besoin de réfléchir.
A la dernière manif où on l'avait croisé, contre le nucléaire et le réacteur européen EPR, tout seul encore, déguisé, sourire et pancarte, drôle comme d'habitude, il parlait nucléaire et politique. On reconnaît la voix, on l'a encore dans l'oreille, il avait du coffre même quand il parlait. Il avait grandi dans une famille bourgeoise de l'Avesnois, mais s'était choisi une pointe d'accent gouailleur, qui allait à merveille quand il chantait «On l'aime bien, qui ça? Nini peau d'chien, où ça? A la Basti-i-lleu!»
A ses funérailles, samedi, quelqu'un a dit qu'il avait acquis peut-être dans les bataillons d'élite des marsouins où il avait été officier, «un mépris souverain et tranquille du danger», qu'il avait mis «au service de la défense des autres». Le même a parlé aussi de son élégance. «Quel bel homme! Quelle belle grande gueule des faubourgs! Un honnête homme, qui avait le charme des grands séducteurs, mais qui ne s'en servait pas pour rouler les autres». Il a ajouté : «s'il s'était moins occupé des autres, sa carrière l'aurait mené au sommet». Denis Cacheux s'est donné la mort dans la nuit de lundi à mardi en se jetant dans la mer du Nord. Depuis l'annonce de la nouvelle mardi, les messages d'adieu tombent par centaines sur le site internet de sa compagnie, Tant qu'à faire.
H.S.
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